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Travailleurs indépendants : L’abattement fiscal sur les dividendes est-il applicable aux cotisations sociales ?

Sommaire

Les revenus mobiliers, tels que les dividendes et les intérêts, perçus par des personnes physiques domiciliées en France, sont généralement assujettis au prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30 %, également connu sous le nom de « flat tax » (12,8 % auxquels s’ajoutent les prélèvements sociaux de 17,2 %). Cependant, les contribuables ont la possibilité, sur option expresse et irrévocable, de choisir le barème progressif de l’impôt sur le revenu pour ces revenus. Cette option leur permet de bénéficier d’un abattement de 40 % sur le montant brut des dividendes, comme prévu par l’article 158 du CGI.

La question s’est posée de savoir si cet abattement fiscal devait être pris en compte dans le calcul des cotisations sociales des travailleurs indépendants, conformément à l’article L. 131-6 du CSS, qui détermine l’assiette des cotisations sociales à partir du revenu professionnel, après certains retraitements fiscaux.

L’Administration s’est prononcée, à plusieurs reprises, en soutenant que les dividendes devaient être intégralement pris en compte pour le calcul des cotisations sociales, sans abattement, mais cette position a été contestée à plusieurs reprises. 

Dans un arrêt du 21 mars 2024, la Cour de cassation a statué pour la première fois sur cette question. 

Modalités de détermination de l'assiette des cotisations sociales

Aux termes de l’article L 131-6 du code de la sécurité sociale, l’assiette des cotisations sociales dues par les travailleurs indépendants est déterminée à partir de leur revenu professionnel tel qu’il est retenu pour l’impôt sur le revenu sous réserve d’une série de retraitements :

  • Le premier retraitement imposé par ce texte, consiste à réintégrer dans l’assiette sociale les sommes exonérées fiscalement, telles que les plus-values à court terme exonérées dans certains cas spécifiques (CSS, art. L 131-6, II-1°).
  • Un autre retraitement implique la prise en compte dans l’assiette sociale d‘une partie des dividendes perçus par les travailleurs indépendants opérant dans une société assujettie à l’impôt sur les sociétés, ainsi que par leur conjoint, leur partenaire pacsé ou leurs enfants mineurs, dépassant 10 % du capital social, des primes d’émission et des sommes versées en compte courant, détenus en toute propriété ou en usufruit par ces mêmes personnes (CSS, art. L 131-6, III-2°).

Remarque : La part des dividendes perçus par un entrepreneur individuel ayant opté pour l’impôt sur les sociétés, ou par un entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL) ayant opté pour la même option, excédant 10 % du bénéfice net ou du patrimoine affecté, est également assujettie aux cotisations sociales (CSS, art. L 131-6, III-3°).

Quid de l'abattement fiscal de 40% ?

Pour rappel, le calcul de l’impôt sur le revenu, les dividendes et les revenus distribués assimilés sont soumis en principe au prélèvement forfaitaire unique (PFU) calculé au taux de 12,8 % ou, sur option globale, au barème progressif, permettant ainsi, conformément à l’article 158, 3-2° à 4° du code général des impôts, le bénéfice d’un abattement de 40 % pratiqué sur le montant brut des dividendes et revenus assimilés.

Cet abattement est applicable aux revenus distribués par les sociétés françaises ou étrangères soumises à l’IS (ou à un impôt équivalent), en vertu d’une décision régulière des organes compétents. Il est réservé aux personnes physiques domiciliées en France et son montant n’est pas plafonné.

Les dispositions de l’article L. 131-6 du code de la sécurité sociale sont silencieuses sur le point de savoir si l’abattement fiscal de 40 % s’applique également à l’assiette sociale.

L’administration a pris position pour la prise en compte des dividendes dans l’assiette des cotisations sociales pour leur montant avant abattement (Circ. Acoss n° 2013-19 du 28 mars 2013 ; Circ. RSI n° 2014-01 du 14 février 2014 et Brochure pratique 2024 pour la déclaration de revenus de 2023 p. 191).

Une position confortée par la Cour de cassation

La position de l’Administration était toutefois contestée depuis plusieurs années par des assurés qui sollicitaient en justice le remboursement d’un trop versé de cotisations sociales correspondant au défaut de prise en compte de l’abattement fiscal par les organismes sociaux pour le calcul de leurs cotisations sociales. Leurs arguments reposaient sur l’identité des assiettes sociale et fiscale ainsi que sur la différence entre abattement et exonération.

Les Urssaf défenderesses dans ces actions faisaient valoir que l’abattement prévu par l’article 158 du CGI se justifie en matière fiscale dans la mesure où il permet d’éviter une double imposition, mais qu’il ne repose sur aucun fondement en matière sociale.

La Cour de cassation approuve la position défendue par l’Administration, en jugeant que, selon les dispositions de l’article L. 131-6 du Code de la sécurité sociale « le revenu professionnel pris en compte pour la détermination de l’assiette des cotisations sociales des travailleurs indépendants non agricoles est celui retenu pour le calcul de l’impôt sur le revenu, avant application des déductions, abattements et exonérations mentionnées aux dispositions du CGI qu’il énumère ».

Dès lors, les dividendes doivent être pris en compte dans l’assiette des cotisations pour leur montant avant abattement.

Remarque : la formulation retenue par la Cour de cassation peut surprendre dans la mesure où justement l’article L 131-6 du CSS ne fait pas mention des éventuels abattements applicables en matière fiscale.

Ce qu'il faut retenir !
  • Pour la Cour de Cassation, les dividendes perçus par le TNS exerçant son activité au sein d’une société soumise à l’IS entrent dans l’assiette des cotisations sociales personnelles dues pour leur montant avant abattement fiscal.

Sources : 

  • Cass. 2e civ., 21 mars 2024, n° 22-11.587
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